21

 

De retour au palais, Anéa demanda :

— Avons-nous le droit de quitter ainsi Poséidonia ?

— Nous le devons. Actuellement, Maerl et Vivyan sont très vulnérables. Tu sais bien que c’est aux alentours du troisième mois que l’âme rejoint le fœtus dans le ventre de sa mère. Nous ramènerons les deux jeunes couples ici. Si les Serpents tentaient quelque chose contre eux, cela repousserait la réincarnation de quelques années.

— Tu penses vraiment qu’ils oseraient s’attaquer à eux ?

— Ils l’ont fait pour nous. Il faut donc agir très vite. Nous utiliserons l’aéroglisseur.

— Alors, je voudrais emmener Maïa et Schoenée. Je ne veux pas qu’il leur arrive malheur en notre absence.

— Bien sûr.

Il s’écarta d’elle et médita quelques instants.

— J’aimerais que tout cela ne soit que le fruit de notre imagination. Cependant je crains que nous ne devions nous attendre au pire. Dès demain, je me rendrai au Sénat. Cela risque d’inquiéter tout le monde, mais nous n’avons pas le choix. Nous devons fabriquer des armes en quantité, équiper les navires, tripler la garde impériale.

Il se dirigea vers le mur où étaient accrochés leurs glaives d’orichalque. Depuis six mille ans, ils constituaient le symbole de leur puissance, mais ils ne les avaient jamais utilisés. Il saisit la lourde épée, dont la poignée s’adaptait parfaitement à sa main, puis se tourna vers Anéa.

— C’est effrayant, dit-il. Je sais bien que nous allons mener cette guerre pour sauvegarder la paix de l’Empire ; et pourtant, à tenir ce glaive, j’éprouve comme une joie malsaine. Comme si j’espérais me trouver face à l’ennemi…

Il revint vers elle, les yeux brillants.

— Sommes-nous encore si éloignés de la perfection, Anéa ?

Elle le prit dans ses bras.

— Les dieux eux-mêmes n’ont-ils pas dit qu’ils commettaient parfois des erreurs ? Et nous ne sommes que leurs enfants. Mais après tout, qu’est-ce que la perfection ? N’est-ce pas de faire ce que nous croyons être juste ? Et il est juste de défendre l’Atlantide.

Astyan s’agenouilla et enfouit son visage contre la poitrine de la jeune femme.

— Anéa, est-ce que je t’ai jamais dit que je t’aimais ?

— C’est arrivé, oui !

Ils se regardèrent, sourirent, puis éclatèrent de rire. La complicité qui les unissait depuis tant de siècles ne s’était jamais ternie. Grâce à elle, ils seraient toujours plus forts que tout. À présent, l’angoisse avait fait place à une sorte d’exaltation : ils n’allaient pas attendre que l’ennemi vînt à eux, ils allaient partir à sa recherche, le débusquer – le détruire.

 

Le lendemain, à la demande d’Astyan, le Sénat se réunit au grand complet. Personne n’ignorait ce qui s’était passé sur le plateau de Fa’ankys ; le vieil Oldma et Mélina, remis de leurs émotions, avaient narré l’aventure avec force détails. Cependant l’affaire revêtait une importance telle que les argontes avaient été soulagés en apprenant que le Titan souhaitait parler à la tribune. Un silence total s’installa lorsqu’il prit la parole.

— Nobles Sénateurs, vous connaissez déjà tous la raison de ma présence parmi vous. Depuis des millénaires, ni Anéa ni moi n’intervenons dans les affaires de la cité et du royaume. Cependant il semble que, cette fois, des événements graves se préparent. Le temple que faisait bâtir Palarkos a été détruit par une explosion dans laquelle nous aurions dû être tués, si un malheureux artisan ne nous avait sauvé la vie en tombant dans le piège qui nous était réservé. La puissance de l’arme employée est terrifiante : il s’agit d’une bombe utilisant les propriétés de l’uraan, ce métal que nous appelons aussi pierre de feu. Vous savez à présent ce que cela signifie. Le plateau de Fa’ankys est désormais frappé par la mort, et il faudra donc interdire cette région.

« Mais ce n’est pas tout. Le récit d’un marin nous a appris qu’il existait, dans une île extérieure à l’Archipel, des monstres terrifiants, mi-hommes, mi-animaux, qui n’ont pu être engendrés par la nature. Cela signifie que des savants ont, malgré notre interdiction, poursuivi des recherches dans le domaine des sciences défendues. D’après le tract retrouvé auprès de la demeure de Palarkos, dont vous avez tous entendu parler, il apparaît qu’un mouvement secret, que nous avons baptisé la secte des Serpents, désire l’anéantissement des Titans et annonce l’avènement d’un dieu nouveau qui permettra aux hommes de s’élever en leur ouvrant l’accès à la totalité de la Connaissance. Vous avez pu constater ce qu’elle est capable de produire lorsqu’elle est livrée à des êtres inconscients, et sans doute animés par une volonté de domination.

« Nous ignorons encore si cette secte se limite à Poséidonia ou si elle s’est répandue dans la totalité de l’Empire. Si tel est le cas, cela signifie qu’une puissance inconnue est en train de naître quelque part, qui complote pour l’élimination des Titans et pour imposer aux peuples de l’Atlantide une nouvelle divinité, connue sous le nom d’Ophius.

« Au nom de cet Ophius, plusieurs hommes sont morts dans des conditions atroces, sans doute tués par leurs propres complices afin de les empêcher de parler. Il semble que la notion de liberté individuelle n’effleure même pas ce nouveau dieu, ou tout au moins ceux qui se cachent derrière son nom.

« Dans le cas où les Serpents parviendraient à nous supprimer, même temporairement, ils n’hésiteraient pas à déclarer une guerre sans merci à l’Atlantide afin de soumettre ceux qui ne se conformeraient pas à leurs idées. Ils l’ont déjà prouvé.

« Nous ne connaissons pas leur puissance exacte. Peut-être ne consiste-t-elle qu’en une poignée de rebelles réfugiés dans une colonie lointaine. Mais peut-être s’agit-il d’une force nouvelle, disposant d’une armée nombreuse et bien équipée, qui attend le moment propice pour attaquer.

« Nous avons contacté nos frères, les Titans des autres royaumes, et nous avons proposé à chaque grande cité de constituer sa propre armée, afin de prévenir toute menace. Le noyau en existe déjà, avec la garde impériale et la marine, mais il faut les développer en recrutant de nouveaux volontaires et en fabriquant de nouvelles armes.

« Il est possible, et nous l’espérons, que ces armées se révèlent inutiles. Mais nous redoutons cependant que l’avenir ne confirme nos craintes.

« Voilà, nobles Sénateurs, ce que j’avais à vous dire. Votre sort repose entre vos mains ; c’est à vous de décider des mesures à prendre.

La décision fut vite prise. Les sénateurs n’avaient jamais mis en doute les paroles des Titans ; depuis l’aube des temps, leurs avertissements avaient toujours été pris au sérieux. Contrairement à ce qu’avait redouté Astyan, personne ne manifesta d’inquiétude ou d’affolement. Au contraire, il décela une sorte de joie sauvage dans l’ovation enthousiaste qui salua la fin de son discours. On allait construire des armes, recruter de nouveaux guerriers, équiper les vaisseaux ; certains sénateurs étaient prêts eux-mêmes à en découdre.

Le vieil Oldma s’approcha du Titan.

— Tu vois, Seigneur, nous sommes tous à tes côtés. Quel que soit cet ennemi, il ne pourra nous vaincre !

 

Le lendemain, Astyan revoyait la scène en pensée, lorsque l’aéroglisseur décolla de sa base, située derrière le palais. L’enthousiasme des Poséidoniens le déconcertait ; ils savaient pourtant qu’une telle guerre se traduirait par de nombreuses victimes. Ce fut à ce moment qu’il comprit que l’homme n’était pas encore sorti de l’animalité. Au fond de lui sommeillait, malgré les soixante siècles de paix qu’il avait traversés, un sentiment latent, prêt à se réveiller : l’agressivité. Elle faisait partie de sa nature, et, en dépit de leurs efforts, les Titans n’avaient rien pu y changer.

Assise à ses côtés, Anéa avait suivi mentalement son raisonnement. Il lui adressa un sourire amer.

— Peut-être est-ce toi qui avais raison. Les hommes doivent faire leurs expériences par eux-mêmes ; il leur faut connaître la guerre et la souffrance pour acquérir la sagesse. Et les dieux, nos parents, ont bien commis une erreur en leur offrant un degré de connaissance qu’ils n’étaient pas prêts à recevoir. Nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir en compagnie des humains.

— Mais je l’espère bien ! Parce qu’ils ont beau être prêts à toutes les folies, ils sont admirables.

Ses yeux se mirent à briller.

— Et je les aime.

 

L’aéroglisseur combinait la propulsion magnétique et l’antigravité. Un fin réseau de tores générateurs de particules gravifiques lui permettait de s’affranchir de la pesanteur. Son fuselage richement décoré luisait d’une couleur argentée très pâle ; de vastes hublots de verre fumé offraient une vision optimale.

L’appareil survola la ville à faible altitude. Le pilote, Païdras, était un homme d’une quarantaine d’années, d’humeur toujours égale, qu’Astyan appréciait beaucoup. Il faisait partie de la suite des Titans depuis une vingtaine d’années, lorsqu’il était sorti premier de l’unique école de pilotage d’Atlantide, à Poséidonia. Les aéroglisseurs n’étaient guère nombreux, les Atlantes préférant voyager par mer ; aussi les navires volants étaient-ils réservés aux Titans et aux argontes.

Maïa et Schoenée restaient collées aux larges hublots. Le paysage éclaboussé de lumière défilait à une allure vertigineuse sous le fuselage de l’aéroglisseur. Bientôt la métropole disparut derrière les brumes légères de l’été. Suivant le ruban sombre de l’Acheloos, l’engin se dirigea vers la barre rocheuse qui menait au plateau volcanique d’Héphaïs. À la limite des hautes chutes provenant du lac Vert, au-delà desquelles le fleuve n’était plus navigable, ils aperçurent une importante horde d’éléphants, que les touristes venaient admirer en remontant le cours d’eau par bateau. L’aéroglisseur prit de l’altitude, survola ensuite les deux lacs, puis franchit la barrière montagneuse couverte de sa forêt de sapins. Plus loin s’étendait le plateau désertique de l’Héphaïs.

Depuis l’époque où ils avaient traversé cette étendue sauvage, soumise aux colères du volcan, les choses avaient bien changé. De vastes prairies la recouvraient ; on avait installé des barrages souterrains qui captaient et régulaient la lave coulant dans les profondeurs de la terre ; ainsi avait-on réussi à dompter les fureurs de la montagne de feu. Depuis des millénaires, son activité n’avait pas cessé, mais la technologie atlante l’avait apprivoisée. Aujourd’hui, elle fournissait plus de la moitié de l’énergie consommée par Poséidonia.

Le plateau, protégé des éruptions, s’était couvert d’une végétation abondante et bigarrée. De grands troupeaux surveillés par des bergers à cheval y paissaient tranquillement. À l’orient s’étendait la fourrure verte de Floorande, l’étrange forêt à étages qu’Astyan et Anéa avaient franchie soixante siècles auparavant. Ils y étaient retournés quelquefois, et y avaient même capturé un spécimen des monstres qui hantaient les profondeurs. C’était une énorme salamandre, qui mesurait près de vingt coudées.

L’aéroglisseur plana quelques instants au-dessus du gigantesque cratère de l’Héphaïs. En son centre s’étendait un vaste lac de lave en fusion, agité par de lents courants de magma dont s’échappaient des colonnes de fumerolles blanchâtres. La technologie avait permis aux Atlantes de dompter l’énergie colossale contenue dans les flancs du géant. Cependant chacun savait qu’il suffirait de la rupture d’un seul des barrages de régulation pour que le volcan laissât exploser sa fureur.

Au-delà s’ouvrait un plateau montagneux recouvert d’une végétation arbustive clairsemée. Puis le relief s’accidenta, se creusant de vallées suspendues, de canyons profonds au cœur desquels se jetaient de fines cataractes. Les rayons du soleil y faisaient naître de magnifiques arcs-en-ciel. Plus loin se dressaient d’énormes éperons rocheux, ainsi que d’étranges aiguilles coiffées de gros rochers rappelant vaguement des silhouettes humaines. On avait surnommé ce lieu la « Plaine des géants ». Hormis quelques chasseurs audacieux, personne ne s’aventurait jamais sur ces terres désolées, où l’acidité du terrain rendait toute culture difficile.

Vers le nord s’élevait un nouveau massif montagneux ; malgré la saison, les sommets se couvraient de plaques de neige qui étincelaient sous le soleil.

Par-delà le massif désertique commençait le royaume de Kamaloth. À l’inverse de la plaine luxuriante de l’Acheloos, les terres du Nord se couvraient d’immenses forêts de sapins et d’épicéas ; on y rencontrait aussi des chênes, des frênes et des bouleaux. En raison de la barrière montagneuse séparant les deux domaines, les végétations différaient totalement.

L’aéroglisseur survola quelques petites bourgades installées sur les rives de lacs minuscules cernés par la forêt, et reliés entre eux par des rivières tumultueuses. Astyan et Anéa connaissaient bien cette région, où ils avaient participé à de joyeuses parties de pêche et de chasse organisées par Maerl et Vivyan. Les torrents regorgeaient de truites, et les lacs offraient asile à des esturgeons de toute beauté.

Peu à peu, l’aéroglisseur perdit de l’altitude. Au loin, l’océan apparut. Sur la côte se dessina une cité construite dans des blocs de granit blond, si particulier à Kamaloth. La cité n’avait pas les dimensions colossales de Poséidonia ; peut-être était-ce dû au climat plus rigoureux qui y régnait. En effet la ville, orientée au nord, devait affronter un courant froid venu de l’ouest, qui passait au cœur du détroit séparant Avallon d’Atalaya, l’île la plus septentrionale de l’Empire atlante. Cependant la chaleur que l’on ne trouvait pas à l’extérieur, on la rencontrait chez les habitants, dont l’hospitalité était légendaire. Ici, les statues n’étaient pas taillées dans le marbre ni coulées dans le bronze, mais sculptées à même les blocs de granit brut. L’habileté des ciseleurs était telle que l’on aurait pu croire les personnages de pierre vivants. Les Kamaléens se partageaient entre diverses grandes activités : la pêche et le commerce maritime, l’industrie et la fabrication de tissus fins. Très jeunes, les femmes apprenaient à tresser les fils de lin, composant des napperons extraordinaires, arachnéens, selon une technique particulière que l’on appelait la « dentelle ». Celle-ci ornait les vêtements quotidiens des Kamaléens. Les femmes portaient des coiffes d’une blancheur immaculée, de formes multiples, où l’on retrouvait différents symboles, qui rappelaient les divinités protectrices du pays. Le dauphin, la licorne de mer, le sanglier et l’ours, et l’étoile à cinq branches du soleil. On y croisait aussi des dessins plus mystérieux, comme le svastika et le mandala. Le svastika représentait l’énergie divine que recelait chaque individu, tandis que le mandala avait une signification plus complexe : il symbolisait l’éternel recommencement qui était à la base du cycle de la vie, le retour immuable des saisons, la succession du jour et de la nuit. De même, il évoquait la résurrection.

Portés à croire au merveilleux, les Kamaléens passaient de longues nuits à observer les étoiles et les astres. C’était à Kamaloth que l’on trouvait les plus perfectionnés des observatoires. Là, des astrologues interrogeaient la lune et les planètes ; les enseignements qu’ils avaient tirés des cycles des astres leur avaient permis d’élaborer une multitude de théories sur l’influence que ceux-ci pouvaient avoir sur la destinée des hommes et des peuples. Nombreux étaient les voyageurs venus des quatre coins de l’Empire qui se pressaient à Kamaloth pour obtenir une réponse des mages, ces personnages qui hantaient les observatoires dressés sur les hautes falaises granitiques dominant la cité. Parallèlement à cette activité divinatoire, et sans doute à cause d’elle, les Kamaléens avaient développé une industrie du verre très performante. Leurs lunettes astronomiques étaient de loin les plus efficaces de l’Atlantide. Ainsi était née une corporation de maîtres verriers, qui taillaient les objectifs les mieux finis, de même que de nombreux objets d’usage courant. C’était toujours un enchantement de visiter les ateliers où opéraient les manouvriers spécialisés, qui façonnaient le verre et le cristal encore brûlants. Verres, carafes, assiettes, objets d’art quittaient Kamaloth pour se répandre dans tout l’Empire et même au-delà. La réputation de ses artisans verriers avait depuis longtemps fait le tour du monde.

 

L’aéroglisseur se posa sur l’esplanade du palais, et les argontes de la cité accueillirent les Titans. Dame Gwaline, la plus ancienne, qui faisait office de chef du Sénat, leur souhaita la bienvenue. C’était une vieille dame aux cheveux gris tressés à la mode de Kamaloth, et relevés sur la nuque. Cependant sa carrure de lutteuse et son énergie démentaient son âge. En l’absence des Titans, elle avait pris en charge la direction du royaume.

Bousculant les usages, Astyan et Anéa exigèrent de rencontrer immédiatement les deux jeunes couples qui devaient redonner vie à Maerl et Vivyan. Comprenant que quelque chose de grave se tramait, dame Gwaline les conduisit à l’intérieur du palais.

Les Titans de Kamaloth étaient décédés depuis près de six années, et leurs anciens corps momifiés séjournaient encore dans la Kaïrnâ. Deïrdra et Sygrine, les deux jeunes femmes qui portaient les futures réincarnations des demi-dieux, se présentèrent devant Astyan et Anéa avec leurs compagnons. La Titanide les sonda aussitôt, sous les regards inquiets des argontes. Affinant sa perception psychique, elle pénétra la chair des deux femmes ; dans son esprit se dessinèrent les images d’embryons humains en parfaite santé. Poussant son investigation plus loin encore, elle s’intégra aux schèmes mentaux des fœtus, puis laissa échapper un cri de joie. Elle se tourna alors vers Astyan, le visage radieux.

— Ils sont là, je les ai reconnus. Ils ont senti ma présence.

— T’ont-ils reconnue, toi ?

— Peut-être. Mais il est encore impossible de communiquer avec eux. Ils sont dans une phase d’oubli total ; il faudra attendre qu’ils aient atteint leur douzième anniversaire, au moins.

Astyan soupira.

— Oui, malheureusement. En attendant, tout peut arriver.

Intriguée, Gwaline s’avança.

— Nous sommes honorés de votre visite, Seigneurs, dit-elle, mais nous direz-vous ce qui se passe ? Aurions-nous commis une erreur ? Nous avons pourtant pris le plus grand soin de Deïrdra et de Sygrine.

Astyan la prit par le bras et sourit.

— Nous le savons, mais il s’agit d’autre chose. Un grave danger menace l’Empire.

En quelques mots, il la mit au courant des derniers événements.

— À Poséidonia, conclut-il, il a été décidé de constituer une armée puissante. Nous vous engageons donc à en faire autant. Les autres royaumes de l’Empire vont agir de même.

Malgré sa personnalité volontaire, la vieille argonte pâlit.

— Tu penses réellement qu’une guerre se prépare, Seigneur ?

— Nous espérons que non. Mais il serait préférable que vos navires soient mieux armés pour le cas où vos marins rencontreraient des créatures comme ces hommes-boucs. Si des savants inconscients ont pu créer de semblables monstres, ceux-ci risquent de se multiplier. Alors il vaudrait mieux s’y préparer. Nous vous y aiderons.

— Nous t’en remercions.

Un homme s’avança. C’était un individu de haute taille, au visage taillé à la serpe et au profond regard sombre, vêtu d’une longue cape de soie violette. Ses cheveux noirs étaient tressés comme ceux des femmes. Gwaline le présenta.

— Ghaffary est le plus grand mage de Kamaloth, Seigneurs. Son savoir est immense. En l’absence de nos Titans, c’est à lui que nous nous adressons pour connaître l’avenir.

Le mage s’inclina avec respect devant Astyan et Anéa. Un sourire énigmatique étira ses lèvres fines.

— Dame Gwaline est très indulgente envers mes faibles capacités. Je ne possède évidemment pas la prescience dont sont dotés les demi-dieux. Mais l’étude des astres nous a toutefois permis de comprendre qu’ils pouvaient influencer le destin des hommes.

Il fit la moue, et précisa :

— Ou tout au moins de prévoir les périodes marquées par d’intenses perturbations. Si cela vous agrée, je serais heureux de vous faire visiter mon observatoire cette nuit, après le repas de bienvenue que nous avons organisé en votre honneur. Nous pourrons ainsi interroger les cieux pour savoir s’il convient de s’inquiéter de ce que nous réserve l’avenir.

Anéa acquiesça. Astyan, plus réticent, finit par accepter à son tour. Le mage leva la main et montra la bague en forme de serpent qui ornait son doigt.

— J’ai entendu ce que tu as confié à dame Gwaline, seigneur Astyan. Mais le serpent est depuis toujours le symbole de la Connaissance. Cela ne veut pas dire que tous les savants appartiennent à cette secte mystérieuse dont tu as parlé. Les scientifiques de Poséidonia ne portent-ils plus cette bague à présent ?

Astyan consentit à sourire.

— Si, ils la portent encore. Pardonne-moi, Ghaffary. Nous serons heureux de visiter ton observatoire.

— Ce sera un grand honneur pour moi, Seigneur !

L'Archipel Du Soleil
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